You are one ?
En broken english, on peut traduire ça par « are you travelling alone ? ». La réponse à cette question n’est pas aussi évidente qu’elle en a l’air. Oui je suis parti seul de Bruxelles. Mais on est rarement seul en Inde ou au Népal. Rien que le fait d’entendre cette question le prouve. Et d’autres questions suivront, peut-être même une conversation, si la barrière de la langue n’est pas trop élevée, selon l’intérêt de l’interlocuteur aussi. A partir de quand est-on seul ? A partir de quand ne l’est-on plus ? Il m’est arrivé de discuter durant 4h non-stop avec Krishna, un indien rencontré sur le train entre New Delhi et Jaipur.
Dans les hostels, les conversations se poursuivent parfois par un verre, un resto, un bout de chemin ensemble. C’est comme ça que Nick s’est retrouvé embarqué avec moi pour 5 jours de randonnée. Peut-on faire confiance à quelqu’un dont on ne connaît que le prénom. Apparemment, oui.
Cette question « You are one ? », on pourrait aussi la prendre au pied de la lettre : « Es-tu un ? ». Sans compromettre mon intégrité physique, je peux raisonnablement affirmer que oui, de la plante de mes pieds à mon cuir très chevelu, je suis entier, peut-être même unique. Mais ce n’est qu’une unité d’apparence, car sous le capot, je suis plein de voix (Miossec), au point que je doute parfois d’en avoir une qui me soit propre. Dans certaines situations, je vous entends vous, les amis, même si vous n’êtes pas là. « Hombre, la vie c’est une ! », « Putain mec, flambe tout, tu vas pas chicaner pour 10 € ! », « On va cruiser ? », « Va pas par là, c’est chez les gens ! ». Il y a aussi les images que j’ai en tête, celles que des écrivains, des réalisateurs, des dessinateurs ont instillé dans mon cerveau. « Flash » de Duchaussois, « Les Chemins de Katmandou » de Barjavel, et bien évidemment « Jonathan » de Cosey, qui est peut-être à l’origine de ce voyage.